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Recueil Alexandries

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Eric Guichard

L’internet et l’écriture : du terrain à l’épistémologie

résumé

à propos

Habilitation à diriger des recherches soutenue le 8 octobre 2010 à l’Université Lyon-I

citation

Eric Guichard, "L’internet et l’écriture : du terrain à l’épistémologie", Recueil Alexandries, Collections Etudes, , url de référence: http://www.reseau-terra.eu/article1075.html

1.3 Mo

INTRODUCTION

Les pages qui suivent constituent un mémoire d’habilitation à diriger des recherches qui explicite le cheminement de ma réflexion en s’inspirant grandement des travaux théoriques comme pratiques réalisés depuis ma thèse (2002). J’ai rédigé celle-ci lorsque j’étais agrégé-répétiteur à l’École normale supérieure (ENS, Paris) et elle m’a valu d’être qualifié en sociologie-démographie et en sciences de l’information et de la communication. En m’offrant le choix entre deux postes de maître de conférences, cette dernière discipline m’ouvrait les portes de l’Université.

Le périmètre intellectuel circonscrit par les sciences de l’information et de la communication témoigne à mon avis de la fertilité d’une approche au croisement des échanges entre les humains et des méthodes et machines qu’ils déploient. La jeunesse de cette discipline et son inscription dans un univers hexagonal pourraient la desservir. On peut cependant considérer que ce sont des atouts pour aborder des questions contemporaines, sauf à supposer qu’on puisse aujourd’hui penser les relations entre les humains en faisant abstraction des prothèses techniques qu’ils ont inventées et dont ils s’entourent pour échanger.

Je n’en oublie pas pour autant l’ensemble des perspectives et des savoirs que j’ai pu affermir au contact des sciences sociales et des mathématiques : les pages qui suivent font abondamment référence à ces fontaines intellectuelles et le fait de penser rétrospectivement la richesse de leurs apports s’avéra particulièrement stimulant et même enthousiasmant. La réflexion sur l’articulation entre ces diverses manières de faire, de regarder, d’orienter la pensée me conduit régulièrement à l’épistémologie, dont je montre qu’elle a plus de liens que prévu avec la technique. Ces constats m’invitent à développer une vision large et accueillante de la notion de discipline. D’une part, je suis désormais persuadé qu’une discipline est plus dynamique, qu’elle se défend mieux en s’exposant, en se montrant bienveillante envers d’autres, à des courants d’idées, au contemporain (et donc aux besoins des étudiants) qu’en adoptant une posture défensive. D’autre part, une discipline renvoie à l’institutionalisation d’une transmission spécifique des savoirs et savoir-faire, celle développée à l’Université ; à ce titre, s’exerce toujours une tension entre ce qui est et ce qui sera enseigné. Et la recherche actuelle signale bien des enseignements de demain. Aussi pensé-je que cette dernière est en grande partie stimulée par les formes de « braconnage intellectuel » chères à Gaston Bachelard et Michel de Certeau : « faire feu » de toutes les connaissances, méthodes, de tous les acquis et de toutes les découvertes des savants et scientifiques, pourvu que les unes et les autres alimentent efficacement et concrètement des problématiques soigneusement définies.

Ce mémoire s’articule en trois parties. La première propose une définition de l’internet et, partant de deux points de vue a priori opposés (industrie mondiale vs individu) soulève des questions simples, qui mènent à des réponses que j’espère aussi simples, mais jusqu’ici peu évoquées. La seconde s’appuie sur mon expérience de chercheur dont la double formation mathématique et anthropologique a pu s’épanouir dans une aventure intellectuelle et technique fort féconde initiée à l’ENS. Sont alors posés les jalons qui me permettront d’inverser ou de renouveler nombre de problématiques quant à l’internet, ses usages, ses discours, et plus généralement quant à l’écriture et la technique. Grâce à ces balises, je puis alors proposer un cheminement qui va de la socio-histoire des sciences de l’information et de la communication à leur épistémologie. Dans la troisième partie, je clarifie la circulation entre technique et réflexivité. En prenant appui sur l’écriture contemporaine et son expression cartographique, j’interroge les relations entre territoire et représentation sociale, entre technique et culture. Ce qui conforte l’approche théorique et pragmatique de ma première partie et me conduit à énoncer une méthodologie qui ouvre vers la possibilité d’une épistémologie générale.


SOMMAIRE

1 L’internet, objet d’étude ?

- 1.1 Définir l’internet

- 1.2 Technique et industrie

  • 1.2.1 Pouvoirs
  • 1.2.2 Utopies et idéologies

- 1.3 La part de l’invention

  • 1.3.1 Le difficile choix des témoins
  • 1.3.2 Créativité, collectifs et cultures
  • 1.3.3 Technique, culture et bricolage

- 1.4 Bilan méthodologique d’une dualité

2 La construction d’un terrain

- 2.1 L’informatique littéraire à l’ENS

  • 2.1.1 Du Soudan à l’internet
  • 2.1.2 Tropismes et part de l’expérience
  • 2.1.3 La découverte du lien entre technique et discours
  • 2.1.4 Rétrospective

- 2.2 Le défrichage d’un terrain

  • 2.2.1 Aux racines des usages de l’internet
  • 2.2.2 Des usages aux territoires de l’internet
  • 2.2.3 Pousser l’écriture à ses limites

- 2.3 Sociologies

  • 2.3.1 Universalisme et déplacements méthodologiques
  • 2.3.2 Auto-analyse en vue de généralisation

3 Technique et réflexivité

- 3.1 Usages et discours

  • 3.1.1 Définir l’internaute
  • 3.1.2 Le législateur prescripteur d’usages
  • 3.1.3 Miliciens et sculpteurs de l’internet
  • 3.1.4 Le plâtre discursif de la fracture numérique

- 3.2 Vers la réflexivité

  • 3.2.1 Les scientifiques et l’écriture
  • 3.2.2 La tresse de l’internet, de ses usages et de ses discours
  • 3.2.3 La cartographie informatique
    • 3.2.3.1 Outils, cheminements et théories
    • 3.2.3.2 L’atlas de l’immigration
    • 3.2.3.3 Données et flux de l’internet
    • 3.2.3.4 Un atlas en SVG

- 3.3 Écriture, territoire et culture

  • 3.3.1 Cartographie et philosophie
  • 3.3.2 La construction des territoires de l’internet
  • 3.3.3 Écrire le territoire
  • 3.3.4 Culture et représentations

- 3.4 Conclusion