Réseau scientifique de recherche et de publication

[TERRA- Quotidien]
Accueil > Revue Asylon(s) > Reconstructions identitaires et résistances > Dossier > Quel modèle d’intégration des migrants (...)

REVUE Asylon(s)

9| Reconstructions identitaires et (...)
retour au sommaire
< 2/6 >
Quel modèle d’intégration des migrants pour des « nationalismes périphériques » en Espagne ? Une analyse comparée entre la Catalogne et le Pays Basque

Jimena Larroque Aranguren
Docteure en Science Politique Attachée Temporaire de l’Enseignement et de la Recherche (ATER) à l’Institut d’Études Européennes (IEE) de l’Université Paris 8 Saint-Denis, février - août 2012 Post-Doctorante à la Chaire de recherche en immigration, ethnicité et citoyenneté (CRIEC) de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), septembre 2011 – février (...)

citation

Jimena Larroque Aranguren , "Quel modèle d’intégration des migrants pour des « nationalismes périphériques » en Espagne ? Une analyse comparée entre la Catalogne et le Pays Basque ", REVUE Asylon(s), N°9, juin 2012

ISBN : 979-10-95908-13-5 9791095908135, Reconstructions identitaires et résistances, url de référence: http://www.reseau-terra.eu/article1243.html

résumé

Dans le contexte politique espagnol traversé par des tensions entre le centre et les périphéries où la gestion du fait migratoire apparaît dans les années 2000, les Gouvernements autonomiques basque et catalan cherchent à définir leur propre modèle d’intégration des immigrés. Agissant sous la bannière de « nations sans État », les Communautés autonomes analysées revendiquent la défense de modèles « nationaux » d’intégration qui se veulent distincts des politiques étatiques. La comparaison de leurs discours hégémoniques en la matière révèle que le processus d’appropriation est plus abouti dans la configuration catalane que dans la configuration basque. Au de-là de soucis identitaires similaires, les processus de nation-building apparaissent menés de façon différente car inscrits dans des contextes historiques, sociaux et politiques divers. Par conséquent, les Communautés basque et catalane témoignent de capacités inégales à formuler un discours achevé et cohérent de jonction entre l’intégration sociale et l’intégration nationale.

En Espagne, le cadre socio-politique dans lequel les politiques publiques sont mises en œuvre constitue une variable d’autant plus fondamentale que les controverses politiques ordinaires portent sur ce même cadre. Comme l’exprime la politologue E. Ritaine :

« Il y a en Espagne, autour de la question des autonomies, une dissension sur la (les) question(s) nationale(s), et de nombreuses disputes sur la légitimité des détenteurs de la puissance publique. La présence étrangère y révèle bien, en miroir, les incertitudes politiques. Elle pose en effet deux questions fondamentales : qu’il s’agisse d’intégrer ou d’exclure l’Étranger, au nom de quelle communauté nationale le proclame-t-on ? S’il faut déterminer une citoyenneté singulière pour l’immigré, sur quelles normes publiques va-t-on l’appuyer ? » [1]

La nature même de l’État des autonomies soulève de fortes controverses opposant le centre et les périphéries en raison de tensions périphériques centrifuges. La Constitution espagnole de 1978 reconnaît « les nationalités et les régions » qui composent l’Espagne (article 2), ce que certains interprètent comme l’expression d’une « nation de nations » [2], voire même comme la reconnaissance d’un « État multinational » [3]. Dans l’optique de la décentralisation politico-administrative autorisée par la formule de l’État des autonomies, les gouvernements successifs en Catalogne et au Pays Basque tiennent à protéger leur identité collective, linguistique et culturelle différenciée du reste de l’Espagne en vertu d’une autonomie politique revendiquée au nom du « fait différentiel » [4]. Dans ce sens, nous employons la formule « nationalismes périphériques » [5] pour désigner l’exercice du pouvoir en Catalogne et au Pays Basque entre les mains d’une hégémonie nationaliste depuis la transition démocratique [6]. D’autres expressions véhiculent les enjeux politiques propres à des pouvoirs infra-étatiques qui rivalisent avec l’État, comme « minorités nationales », « nations minoritaires », « nations sans État » [7], voir même « contre » l’État [8], catégories de discours qui ne sont pas strictement analytiques mais aussi revendicatives. Au-delà de l’opportunité d’une expression ou d’une autre, notre objectif est de questionner cette dimension nationale et de réfléchir au poids de la variable nationalitaire dans les discours politique. Autrement dit, on se demande s’il existe dans ces Communautés autonomes des stratégies de préservation d’une identité politique spécifique à propos de la thématique de l’intégration des immigrés.

Prenant acte de ce contexte politique polymorphe, la pertinence de la focale régionale pour comparer les politiques d’intégration catalane et basque se justifie pleinement. En vertu de la Constitution et des statuts d’autonomies [9], l’État doit contrôler les flux migratoires tandis que les Communautés autonomes gèrent l’intégration des immigrés, dossier inséré plus largement dans les politiques sociales. Or, les choses ne sont pas aussi simples : il ne manque pas d’y avoir entre ces différentes échelles des rapports de complémentarité aussi bien que de concurrence, d’autant plus que la gestion de l’immigration exige de concilier des objectifs souvent contradictoires entre le contrôle des flux et l’intégration effective des immigrés. Par exemple, nous pouvons affirmer que des outils de collaboration comme les réunions au sein du Conseil supérieur de la politique de l’immigration (CSPI) sont prévus mais jugés inefficaces [10]. Selon plusieurs juristes, le bilan de l’interaction entre administrations s’avère négatif en raison du manque de coordination notamment verticale et des « rapports sporadiques et peu formalisés » [11]. Quant à la loi espagnole sur les étrangers adoptée en 2000 et ses réformes successives, l’ensemble des Communautés autonomes dénoncent son caractère fortement restrictif en termes de droits des étrangers car directement tributaire de l’esprit de « l’Europe-forteresse » de l’espace Schengen.

Au milieu de la décennie 2000, se produit un certain renversement fonctionnel qui complexifie le schéma de partage de pouvoirs. Pour contrer la réputation répressive du gouvernement Aznar, le gouvernement de Rodríguez Zapatero s’engage à partir de 2004 dans la diffusion de principes communs d’interculturalité - impulsés par la Commission européenne à partir de 2000 - mais aussi l’année suivante dans la distribution de ressources économiques pour financer l’intégration des immigrés sur tout le territoire [12]. Inversement, les Communautés autonomes que nous étudions prétendent déployer des politiques intégrales comprenant le contrôle et l’intégration. Malgré des querelles de compétence avec l’État, la Catalogne parvient davantage à affirmer son pouvoir contrairement au Pays Basque.
En effet, suite à la réforme du Statut de la Catalogne en 2006 remplaçant celui de 1979, l’exécutif autonomique élargit de façon inédite ses pouvoirs en matière d’immigration : il gère les entrées des flux migratoires en fonction de son propre marché du travail et dispose d’un pouvoir exclusif en matière d’accueil et d’intégration [13]. Ce dernier volet autorise une prééminence de l’intégration linguistique comme preuve de l’appartenance de l’immigré à la « nation » catalane. Par contre, bien que le Pays Basque dispose juridiquement des mêmes possibilités d’élargissement de pouvoirs, les divergences politiques internes empêchent un accord sur la réforme du Statut de Guernica en vigueur depuis 1979 [14].

En ce qui concerne la population immigrée, la récente transformation de la société espagnole est frappante si on la compare à d’autres pays européens voisins aux longues traditions d’accueil. Nous observons une constante augmentation de la population étrangère entre 2000 et 2009 et une légère stagnation du taux d’immigration en 2010 et 2011 à cause de la crise économique que connaît l’Espagne : il passe de 2,3% à 12,2% pour la moyenne nationale, de 2,9% à 15,7% en Catalogne et de 1% à 6,6% au Pays Basque [15].

Nous nous intéressons aux conditions d’émergence des discours politiques hégémoniques en matière d’intégration des immigrés au sein des Communautés autonomes, responsables in fine de l’intégration des immigrés. Ces discours sont le produit de plusieurs acteurs présents dans l’élaboration des politiques : administrations, médias, partis politiques et universitaires/experts [16]. Les modèles d’intégration dépendent donc très largement des cadres politiques et idéologiques propres aux Communautés basque et catalane. Dès lors un certain nombre d’interrogations se posent : comment l’intégration des immigrés est-elle conçue au sein des « nations » basque et catalane ? Existe-t-il un discours hégémonique sur lequel repose une « intégration nationale » ? Pour y répondre nous suivons une méthode qualitative d’analyse des discours, nos matériaux principaux étant des entretiens semi-directifs [17] que nous restituons en italique et de façon anonyme sauf pour les responsables notoires, le discours administratif contenu dans des « plans d’intégration » généralisés dans les années 2000 [18] et les références à des articles de presse.

La littérature espagnole en sciences sociales s’est pour l’heure intéressée à décrire les transformations socio-économiques opérées sur la société espagnole, ainsi que le traitement de l’immigration du point de vue juridique [19]. Il existe par ailleurs quelques travaux qui dressent des comparaisons entre les Communautés autonomes sur l’objet de l’intégration des immigrés [20]. Par contre, ces travaux nous disent très peu sur l’intégration des étrangers prise sous l’angle de l’autogouvernement de ces Communautés : citons les travaux comparés de S. Gil Araújo entre les politiques catalane et madrilène [21], ou ses monographies sur la question en Catalogne [22]. Précurseur des interrogations qui envisagent la double perspective immigration/nations minoritaires, les travaux de R. Zapata-Barrero contribuent largement à la production des discours politiques en Catalogne selon une approche normative.

Les politiques d’intégration qui en résultent redéfinissent à part entière la communauté nationale selon l’expression « politics of reconceptualising community  » [23]. La réutilisation de cette expression dans ces contextes là témoigne de l’occasion pour des élites politiques en l’occurrence autonomiques de définir ces politiques publiques naissantes [24]. Nous cherchons à déceler des stratégies d’appropriation de la thématique de l’intégration des migrants par des Gouvernements infra-étatiques soucieux de préserver leurs identités politiques particulières pendant la période 2000-2009 [25].

Cet article se divise en trois sections : dans un premier temps, nous identifions les arguments forts des discours érigés au sein des Communautés autonomes qui illustrent les enjeux relatifs à des gouvernements agissant comme des « minorités nationales » (section 1). Nous analyserons ensuite la place de la variable nationalitaire dans les discours des deux Communautés autonomes retenues (section 2 pour la Catalogne et 3 pour le Pays Basque).

Section 1. Lorsque des minorités nationales font face à l’immigration

L’enjeu pour ces gouvernements infra-étatiques est d’offrir un cadre dans lequel bâtir des politiques favorables à l’accueil des immigrés de manière à ne pas entraver un projet nationaliste dont nous présentons ses caractéristiques principales. Les « nations » basque et catalane s’inscrivent de façon croissante dans la perspective des nationalismes civiques qui repose sur un critère politique (et non ethnique) caractérisé par la volonté de s’intégrer à la communauté. Ce type de nationalisme sollicite du citoyen qu’il manifeste une volonté notoire d’engagement national, au moment même où les clivages politiques structurant les rapports de pouvoir classiques semblent en perte de vitesse [26].

La représentation de l’immigration comme menace à l’identité nationale étatique est classique dans les États forts et dans ceux qui ont des traditions d’immigration étayées [27]. Mais cette peur est ressentie également dans le cadre d’une identité infra-étatique. D’après le politologue catalan R. Zapata-Barrero, il faut « transformer le facteur ennemi en facteur positif, soit convertir l’élément de pression en avantage : faire en sorte que les immigrés soient des alliés de la Catalogne » [28].

Afin d’évaluer la cohérence entre des modèles d’intégration des étrangers et des hypothétiques compromis nationalistes, nous énonçons trois sous-variables prises en compte dans notre comparaison : la mise en place d’un discours de rivalité face à l’État, la mobilisation du « précédent migratoire » dans les discours actuels de l’intégration et enfin, les fondements sur lesquels s’appuient les soi-disant « modèles » autonomes d’intégration.

1) La rivalité discursive avec l’État se base sur la revendication des gouvernements infra-étatiques d’avoir une meilleure capacité à intégrer et sur la l’inadaptation du pouvoir étatique qui en découle. S’appuyant sur l’exemple québécois, celui d’une autre minorité nationale, les partis nationalistes insistent sur les effets néfastes qu’engendre une attitude de laissez-faire de la « petite nation » eu égard à l’intégration dans la culture majoritaire étatique [29]. Seules des politiques « d’anticipation » dans la prise en charge de la question migratoire par ces « nouveaux acteurs politiques » peut répondre aux défis de l’immigration [30].

2) La mobilisation d’un discours mettant en avant la « tradition d’accueil » des Communautés autonomes basques et catalanes à l’égard d’immigrés provenant d’autres régions espagnoles, constitue un élément essentiel de la stratégie d’appropriation des politiques d’immigration. Établir ce rapport de parallélisme diachronique entre l’immigration d’hier et celle d’aujourd’hui, permettra de consolider un continuum cognitif renfermant une même conception de « l’intégration nationale ». Or, ce discours au service de l’édification de modèles d’intégration s’incarne de nos jours très diversement dans chacune des Communautés autonomes : de façon très visible en Catalogne, quasiment inexistante au Pays Basque.

3) En matière d’intégration des étrangers, le modèle promu en Espagne correspond au modèle « interculturel », titre un peu vague qui révèle surtout l’absence d’un discours identitaire spécifiquement espagnol, laissant « libre cours » aux Communautés autonomes d’introduire leurs propres conditions d’allégeance identitaire. Pour expliquer les différences entre les modèles d’intégration envisagés, nous nous référerons à deux variables complémentaires : les équilibres politiques entre 2000 et 2009 au sein de chacune des Communautés donnant lieu à l’adoption d’accords ou pas sur cette politique publique ; puis les politiques linguistiques respectives, pouvant favoriser une plus forte intensité de la variable nationalitaire dans la construction des modèles d’intégration.

Section 2. Le pari de l’intégration nationale en Catalogne

Nous observons dans la sphère publique catalane l’existence d’une « culture publique commune » bâtie sur un paradigme d’intégration catalaniste envers l’immigration et sur une politique de « normalisation » linguistique particulièrement réussie. Pourtant, ce modèle d’intégration se heurte à un manque de réflexion plus approfondie sur la diversité culturelle au sein de la société de réception, qui pourrait contredire l’ouverture prônée.

2.1. Discours de rivalité entre la « nation catalane » et l’État-nation

Les discours entourant la prise en charge par les institutions catalanes de la gestion de l’intégration des immigrés contiennent des références à la cohésion nationale, de manière plus « décomplexée » en Catalogne qu’au Pays Basque [31]. Le Gouvernement catalan accentue les éléments différentiels de son cadre national, en vue de faire progresser le processus de « nation building » [32]. Une telle occasion de définir la Catalogne de manière consensuelle se voit d’ailleurs qualifiée « d’opportunité historique pour le nationalisme [catalan] » [33]. Y compris depuis l’enceinte académique, certains chercheurs exhortent les institutions catalanes à bâtir une « philosophie propre catalane » capable de mettre en rapport l’immigration, l’autogouvernement et l’identité [34]. Ceci suppose de considérer la Catalogne comme une réalité différenciée vis-à-vis de l’Espagne et les migrants comme un collectif devant contribuer à la construction nationale d’une nation au sein d’un État multinational. Le danger de « perte d’hégémonie nationaliste » et de « castillanisation de l’espace public » devra être renversée par une « catalanisation » profonde de l’espace public [35].
Devant ce choix entre deux fidélités politiques alternatives, les institutions autonomiques promeuvent l’adhésion à la catalanité comme l’exprime le premier Secrétaire de l’immigration entre 2000 et 2002, Ángel Miret :

«  Il faut choisir entre l’axe catalan ou l’axe espagnol. Notre objectif à nous, hommes politiques, est de créer un espace civique de coexistence, également de définir des éléments comme l’État, la Nation, le Peuple selon la catalanité. Cela sera bon pour tous, mais si on ne le fait pas rapidement c’est eux qui le feront. Et si nous construisons cet axe selon l’espagnolité il y aura inévitablement un conflit… » (entretien, le 14/03/06).



Le leadership de la Catalogne dans la péninsule ibérique est fortement lié à la notion même de « catalanisme », dominant les interactions entre la Catalogne et l’Espagne durant le deuxième tiers du XX eme siècle, comme l’évoque J. M. Colomer [36]. Ainsi, depuis le Plan interdépartemental de 1993 jusqu’à l’adoption du Pacte National pour l’Immigration (PNI) à la fin de 2008 [37], l’évolution de l’action gouvernementale atteste de l’existence irréfutable « d’une culture politique de l’immigration » [38]. Ce dernier grand pacte politique constitue l’expression la plus aboutie du consensus national et de la fusion entre objectifs nationalitaires et impératifs d’intégration. Ses trois principaux objectifs consistent à gérer les flux migratoires conformément aux besoins du marché du travail catalan, adapter les services publics à l’augmentation de population et « intégrer dans une culture commune ». Par ailleurs, ce pacte décrit le phénomène de l’immigration « comme une nouvelle opportunité pour définir le pays que l’on sera dans le futur » [39].

2.2. Consécration de la « doctrine catalane de l’intégration »

À travers la mobilisation du « précédent migratoire », le discours actuel des pouvoirs publics se nourrit de l’expérience des processus migratoires passés. Le préambule du Statut d’autonomie de 2006 évoque le mythe de la « terre d’accueil » [40]. L’essor économique de cette région dans les trois premiers quarts du XX eme siècle a été soutenu par une croissance démographique principalement basée sur une immigration interne issue d’autres régions espagnoles plus déprimées économiquement. Entre 1950 et 1975 cette immigration a représenté un solde positif de 1,5 million de personnes, de sorte que 38% des personnes qui vivaient en Catalogne en 1975 étaient nées hors du territoire [41]. Ces flux migratoires importants, liés d’abord à un exode rural interne à la Catalogne, s’élargissent ensuite aux populations venant de l’Aragon et de la Valence limitrophes, puis à l’immigration venue de Murcia, de l’Andalousie, de l’Estrémadure, de la Galice et de la Castille [42].
Ce n’est qu’à partir des années 2000 que l’immigration internationale commence à être considérée comme un élément structurant de la démographie catalane. La diversité des origines des immigrants est appréhendée par le discours officiel du plan d’immigration 2001-2004 comme une source de richesse, évoquant au passage la « tradition d’intégration » et une supposée « attitude pour l’intégration » [43].

La définition du Catalan préconisée dans les années soixante proposait une catalanité capable d’accueillir le non Catalan de souche. Elle était alors déjà fondée sur la résidence et sur la volonté d’appartenance conformément à la formule : « Est Catalan celui qui vit et travaille en Catalogne » [44]. Cette notion souple d’appartenance a été à l’origine de la métaphore du « creuset catalan » [45] pour désigner une communauté nationale catalane [46]. Certains extraits du deuxième plan d’immigration catalan couvrant la période 2001-2004, sont révélateurs de la façon dont la Generalitat réactualise la « doctrine catalane de l’intégration » [47].

La cohérence discursive entre l’ancienne intégration d’Espagnols non Catalans et celle concernant l’immigration extracommunautaire d’aujourd’hui parvient à s’imposer sans failles temporelles. Soulignons qu’il n’existait pas toutefois de politiques migratoires en tant que telles lors des années 50-60, encore sous le régime franquiste. Les enjeux d’intégration à l’époque, comme le signale C. Barbosa, se limitaient à des processus de « ‘recatalanisation’ du territoire pour parvenir à une ‘normalisation culturelle’ » [48].

La doctrine de l’intégration des années 60-70, attribuée à J. Pujol, ancien leader de la Convergència i Unió (CiU) [49], met en scène une « communauté de destin » autour du catalanisme en tant que « référentiel de l’intégration ». Une telle conception du modèle catalan a rassemblé en novembre 1971 l’ensemble de forces politiques de l’époque autour de l’« Assemblée de la Catalogne » pour exprimer une lutte commune contre le régime franquiste et pour la revendication nationale [50]. L’élément clé du catalanisme repose sur la langue catalane, qui elle seule doit permettre l’égalité de chances dans l’échiquier social et national. Pourtant il existe aussi un autre discours qui tempère l’esprit quelque peu naïf du catalanisme intégrateur. Prenons pour exemple l’essai-reportage Els altres catalans de F. Candel publié en 1964, témoignage des conditions de vie des immigrés Espagnols en Catalogne (lui-même immigré Valencien) [51]. Ce portrait sociologique dénonce les difficultés d’une intégration effective et une réelle ascension sociale, dévoilant des clivages sociaux et politiques entre Catalans et non Catalans [52]. Des représentations duales perdurent donc au cœur de l’identité nationale catalane comme l’a montré la sociologue M. -C. García [53]. Mais malgré ces manquements à l’unité politique et sociale, les références au précédent migratoire pour fonder la « culture publique commune » sont mises en avant dans le Pacte National pour l’Immigration de 2008 [54].

2.3. L’endroit et l’envers du paradigme de l’intégration nationale

En ce qui concerne le modèle dans sa forme actuelle, nous postulons l’idée d’une continuité dans le paradigme de l’intégration nationale des étrangers malgré le changement de Gouvernement en 2003 qui bascula de la Convergència i Unió (CiU) à la coalition tripartite formée par le Parti Socialiste de Catalogne (PSC), l’Esquerra Republicana de Catalunya (ERC) et l’Iniciativa per Catalunya Verds (ICV) au pouvoir jusqu’à la fin 2010 [55]. Nous n’hésitons pas à affirmer que le consensus entre les forces politiques catalanes concernant la réforme statutaire de 2006 consolide un « paradigme identitaire » autour de la catalanité. Ce dispositif relève principalement de l’usage généralisé de la langue autochtone et s’érige en facteur de rassemblement politique et social, à même de produire la dite « culture politique commune ».

Comme le soutient Y. Cultiaux : « le paradigme identitaire s’est imposé comme un prérequis pour toute formation politique aspirant au pouvoir en Catalogne » [56]. Cet argument explique le succès de l’accord autour du nouveau Statut et la célébration de la Catalogne comme « nation » [57]. Ainsi, le Pacte National de l’Immigration adopté en 2008 sous la bannière d’ERC – parti à la tête du Secrétariat pour l’immigration depuis 2003 au sein de la dite coalition - reflète la stratégie partagée liant intégration sociale et nationale. Le catalanisme auquel souscrivent les deux partis qui se sont succédé dans la gestion de l’intégration des étrangers, le CiU et l’ERC, a fourni le socle qui légitime une politique d’intégration nationaliste. L’expression « voie catalane de l’intégration » inscrite dans le deuxième plan d’immigration catalan (2001-2004) symbolise les efforts d’appropriation des politiques migratoires en vue de la construction d’un nouveau modèle spécifiquement catalan [58].

Une rencontre organisée dans l’enceinte parlementaire entre le leader de la CiU, Artur Mas [59], et un millier d’immigrés aux origines diverses en décembre 2008, illustre parfaitement ce postulat national. Cette manifestation publique dont le slogan était « Tots som Catalunya » [60], visait à informer les étrangers des formes et des enjeux particuliers d’une intégration au sein d’une « société distincte » [61] :

« Mas fit remarquer à l’audience sur la Catalogne : ‘Ne pensez pas que ceci est simplement une région espagnole. Juridiquement, ceci est une communauté autonome, mais c’en est pas une. C’est une nation’ » [62].

Pour bénéficier de l’accueil, un effort d’intégration est attendu en contrepartie, consistant à « ‘aimer aussi la Catalogne’ et son identité différenciée comme nation » [63]. Ce discours cherche à exalter le « sentiment de pays au-delà des idéologies et des clivages droite/gauche » et à dissoudre toute divergence dans un catalanisme unificateur correspondant au courant de la « socio-convergence » proposé par la CiU : ainsi, ce courant relève d’un nationalisme « modéré », plus catalaniste que nationaliste, visant avant tout la défense de l’identité culturelle et linguistique.

Par ailleurs, la diffusion du catalan détient une place fondamentale dans le paradigme d’intégration catalaniste. Depuis le processus de normalisation linguistique enclenché dans les années quatre-vingt, la langue est vecteur d’intégration nationale en Catalogne [64]. De ce fait, plus de 11 millions de personnes comprennent le catalan et plus de 9 millions le parlent dans les territoires catalanophones d’après des données statistiques de 2003 et 2004 de la Generalitat [65]. La Catalogne occupe la 88ème position dans le classement des langues les plus parlées dans le monde [66]. Ce lien entre langue et nation catalane répond à un « modèle de nationalisme linguistique » [67]. Dans ce contexte, la politique catalane d’intégration d’immigrés est une politique essentiellement linguistique [68].
Cette logique expansive de la politique catalane motiva la mise en place du « projet XILA » consistant à aménager l’accès des immigrés à des cours de catalan et à établir des agences de recrutement à l’extérieur entre 2002-2004 [69]. D’après le gouvernement central ces bureaux ressemblaient trop à des « ambassades », par conséquent sans droit d’exister [70]. Ceci donna lieu à un conflit de souveraineté entre la Catalogne et l’État, et le Tribunal Constitutionnel décida à l’époque de la fermeture de ces bureaux.

Pourtant, le Statut de 2006 déclare que la langue catalane est la langue propre de la Catalogne dans l’espace public, ce qui motive un budget considérable en politique linguistique qui s’élève à 158,34 millions d’euros en 2009, 0,43% du budget total. Parmi les mesures prises en faveur de la population immigrée on peut mentionner l’établissement de « salles d’accueil » [71] pour les enfants d’immigrés qui ont entre 8 et 16 ans. Ces salles d’accueil visent la mise à niveau en langue catalane dans la mesure où l’enseignement est totalement dispensé en catalan dans l’éducation obligatoire.

Plus récemment, la loi d’accueil adoptée au printemps 2010 encourage encore davantage l’apprentissage du catalan par les immigrés. Sur le plan personnel, l’individu qui parle catalan accroît ses chances d’obtenir un avis positif dans la démarche d’enracinement social, et donc de se faire régulariser. Sur le plan collectif, les organisations qui s’expriment en catalan seront plus facilement candidates à des subventions gouvernementales. Cette mesure a soulevé des fortes oppositions venant des associations de latinos qui la perçoivent comme une imposition linguistique. Par exemple, la présidente de Fasamcat [72] interposa des amendements au Plan National pour l’Immigration contre une excessive acculturation au catalan notamment pour les hispanophones adultes et immigrants de première génération [73]. Voici un extrait d’entretien avec le président de la Fédération d’organisations latino-américaines de Catalogne (Fedelatina) [74], lui-même de nationalité argentine :

« On nous demande de parler le catalan, ils nous disent qu’on cessera ainsi d’être immigrés alors que ce n’est pas vrai, je serai toujours un immigré. Je comprends qu’ils aient une revendication culturelle et identitaire à faire. Mais ils sont trop concentrés sur la forme et l’impératif du ‘parla catalá’, et pas sur le fond. Je ne suis pas d’accord sur le ‘deal’ qui consisterait à apprendre le catalan en échange d’une récompense. En plus, à moins que tu t’installes dans une commune aux alentours de Girone, le castillan reste la langue principale pour communiquer, c’est plus utile (…). Ils ne peuvent pas nous obliger à parler le catalan, ils doivent au mieux essayer de transmettre l’affect à la langue et à la culture, et de nous accepter socialement sans conditions » (entretien, le 27/03/06)

Au final, les hostilités furent apaisées et le pacte signé. Certains collectifs Fedelatina iront jusqu’à établir des protocoles de collaboration avec des organisations proches de la Generalitat, dans la promotion de la langue catalane [75]. Ainsi, les collectifs hispanophones, les plus à même de comprendre et utiliser la langue catalane [76], représentent aux yeux de l’Administration des acteurs stratégiques devant aussi « participer à la construction du pays » [77].

Toutefois, la classe politique n’a pas réellement développé à l’heure actuelle une véritable réflexion sur la question de la diversité culturelle qu’amènent des populations immigrées [78]. E. Ritaine signale les conflits déclenchés par la mise en œuvre de l’intégration locale à partir du thème de la construction de mosquées soulevant des problématiques d’aménagement de l’espace urbain et de signes culturels. En outre, l’émergence du parti xénophobe à l’échelle locale Plataforma per Catalunya (PxC) constitue une réalité incontournable qui obscurcit le paysage politique local [79]. Ce parti représente, pour reprendre les mots de l’historien X. Casals, « l’éclosion d’un national-populisme catalan » dans la dernière décennie [80]. Bien qu’encore absente au Parlement catalan, cette adhésion partisane en hausse témoigne d’un électorat mobilisé contre les risques de « pollution » d’une identité catalane et catholique.

En dehors de la posture extrême anti-immigrée de PxC, l’ancien leader de la CiU, J. Pujol, faisait des déclarations tranchées sur l’immigration extracommunautaire dans un discours prononcé à Madrid en avril 2000 : il affirmait préférer un Polonais catholique à un Marocain musulman pour des raisons de distance culturelle religieuse [81]. Dans la même veine, la femme du leader de la CiU, M. Ferrusola, affirmait que les immigrés veulent « imposer » leur religion et leurs coutumes, et que « les aides sociales sont destinées à des personnes qui ne savent pas ce qu’est la Catalogne » [82]. Ce fut également le cas des propos de l’ancien secrétaire général d’ERC et président du Parlement catalan, H. Barrera, qui dans un livre exprimait des opinions inspirées de l’extrême droite [83]. Cet ensemble de discours fut unanimement condamné par les syndicats, les ONG et l’opposition politique de l’époque [84], y voyant parfois une proximité irrésistible entre nationalisme et xénophobie [85].

Par ailleurs, les spéculations sur le futur vote immigré en Catalogne sont omniprésentes dans les discours de l’intégration. Certains y voient, derrière le caractère ouvert des partis nationalistes, des stratégies pour attirer le soutien des futurs électeurs étrangers. Il est question aussi des réticences de la CiU devant l’extension du vote immigré, en prévision des possibles effets négatifs sur l’identité catalane [86].

Par conséquent, même si l’intégration des immigrés peut soulever des positions de réticences plus ou moins frontales, elle est conçue dans le cadre de la « nation catalane ». Seulement quelques partis minoritaires en Catalogne, comme le PP et Ciutadans de Catalunya, se prononcent eux contre l’adhésion à une certaine culture publique catalane jugée « assimilationniste » [87]. Mais à la différence de la langue basque, la langue catalane est la langue de prestige autant dans l’intégration des immigrés Espagnols que dans celle des immigrés extracommunautaires [88]. Les institutions autonomiques catalanes établissent la corrélation nécessaire entre l’intégration sociale des étrangers, leur intégration linguistique et in fine nationale. Nous pouvons dans l’ensemble confirmer l’existence d’un discours hégémonique fondé sur le modèle d’intégration développé autour d’un « catalanisme consensuel ».

Section 3. Une politique d’intégration nationale informe au Pays Basque

Les discours sur l’intégration des immigrés analysés au Pays Basque n’apparaissent pas réellement institutionnalisés dans la mesure où les plans d’intégration ne nous disent pas grand-chose sur le poids de la variable nationalitaire dans les discours et les représentations. La littérature portant sur la question de l’intégration « nationale » est particulièrement limitée, faiblesse que nous avons choisi de compenser à travers l’exposition de fragments d’entretiens.

3.1. L’hypothèse de l’anticipation des pouvoirs publics basques face à l’État

Au Pays Basque comme en Catalogne, les discours politiques en matière d’immigration s’articulent autour de la même dialectique opportunité/problème. L’immigration comme « problème » est un risque que les institutions essayent de maîtriser par des politiques de sensibilisation médiatique [89], contre l’emploi de certains termes qualifiant l’immigration de « massive » ou « d’avalanche » [90], pouvant «  favoriser un imaginaire collectif selon lequel l’immigration est un problème  » [91]. Favorisées par une faible pression migratoire, les instances publiques peuvent encore s’appuyer sur l’envergure relativement « maîtrisable » du phénomène au Pays Basque.

À l’image de la Catalogne, la « nation sans État » basque justifie ses ambitions d’appropriation de la politique d’intégration par des arguments identitaires prenant la forme du postulat « identité autochtone forte, intervention publique plus entreprenante » selon un sociologue de l’Université du Pays Basque et co-directeur de l’Observatoire basque de l’immigration [92]. Ces propos illustrent l’idée d’un antagonisme entre les deux échelles, « nation basque » et État-nation : la nation infra-étatique doit « devancer » l’État et s’approprier au plus vite cette politique. La représentation de l’immigration comme « opportunité » sera confirmée ou infirmée par le futur soutien politique des immigrés au nationalisme :

« Si un jour les immigrés se font régulariser en sorte qu’ils aient le droit de vote, il faudra voir de quel côté ils voteraient, dans la logique nationaliste ou non nationaliste. Seulement à ce moment là on pourrait vraiment voir si leur intégration est une opportunité ou pas. Mais aujourd’hui dire que c’est une opportunité, c’est trop prématuré  » (entretien, le 13/02/07).

L’attitude accueillante des formations politiques qui se définissent politiquement comme nationalistes est fortement affichée. Ainsi, un juriste de l’Université de Deusto soutenait l’ouverture des politiques mises en œuvre dans le territoire infra-national et la plus forte prédisposition de la société basque en tant que « société distincte » à assumer la diversité culturelle :

« Je suis persuadé que les nationalismes de base sous-étatique comme le basque sont plus ouverts devant des problèmes concernant la gestion de la pluralité culturelle que les membres des majorités nationales étatiques. Souffrant d’une minorisation de la langue propre, cette situation favorise une plus grande sensibilité envers d’autres formes de minorisation. Les membres de ces minorités nationales vont être plus enclins à comprendre la pluralité culturelle  » (entretien, le 7/06/04).

Même si le discours de l’opportunité apparaît aussi bien dans le terrain basque que catalan, des différences existent concernant leurs sources : en Catalogne ces discours sont issus des documents administratifs alors qu’au Pays Basque nous ne disposons que de discours énoncés à titre personnel. En effet, un surprenant silence entoure le projet nationaliste du Gouvernement basque sur la nécessité de fonder un discours politique d’intégration nationale.

3.2. Où est passé le précédent migratoire dans le discours de l’intégration à la « nation basque » ?

L’histoire migratoire du Pays Basque est fortement marquée par le développement économique du territoire qui constituait le plus grand centre industriel espagnol dans le domaine de la sidérurgie et du chantier naval. Tout comme en Catalogne, ce dynamisme économique favorisa une importante immigration venant d’autres régions espagnoles depuis la première moitié du XIX eme siècle jusque dans la décennie 1960-70 [93]. Plusieurs travaux sociologiques relatent la tradition d’immigration espagnole en terres basques, à l’image de l’ouvrage portant sur les cent cinquante ans d’immigration interne à destination de cette région fortement industrialisée [94]. L’historiographie sur le nationalisme basque s’accorde pour situer son émergence au moment du processus d’industrialisation dès la première moitié du XIX eme siècle [95].

Tout au long de ce processus, les rapports entre populations autochtones et immigrées ont suscité des conflits nourris par des soi-disant différences ethniques [96], mais davantage politiques, sociales et économiques [97]. La « méfiance mutuelle entre Basques et immigrés » pouvant dégénérer en un « conflit plus ou moins virulent » [98] se manifesta dans des affrontements politiques conduisant à un résultat contraire au rassemblement politique symbolisé dans « l’Assemblée de Catalogne » des années 60-70.

Les traces d’un précédent migratoire à même d’inspirer les politiques publiques du présent étaient inexistantes dans ce contexte de confrontation sociale. Aucun discours officiel faisant référence à une quelconque expérience d’intégration d’immigrés Espagnols ne figure dans les récents plans basques d’intégration qui sont au contraire entièrement tournés vers l’avenir [99]. Comme l’analyse le sociologue X. Aierdi dans les extraits qui suivent :

« L’immigration en provenance d’Espagne a en quelque sorte brisé les schémas du nationalisme basque. Il est curieux que l’immigration de l’Afrique n’induise pas le même type de problème, même si dans le cas d’un accroissement du nombre d’immigrés Africains, il est probable qu’elle le devienne ».
« Pour le nationalisme basque, l’immigration espagnole est essentiellement un problème politique, parce que l’immigration rompt avec l’image homogène que le nationalisme souhaite refléter. Le problème est politique parce que l’immigration est issue de l’unité politique qu’il repousse. Le pilier le plus authentique et consistant du nationalisme basque a reposé sur le refus de l’Espagne, et ce sont précisément les membres de cette réalité espagnole qui viennent dans Euskal Herria [100] » [101].

Ces discours révèlent un affrontement entre « mémoires », celle des autochtones et celle des immigrés venant d’autres régions. La raison du manque de mobilisation d’un précédent migratoire commun est due à une interprétation du passé non partagée qui souvent s’affiche comme une schématisation bipolaire entre des partisans du nationalisme et ceux du non nationalisme.

Nous pouvons donc signaler un certain décalage entre deux sortes de discours : d’une part celui élevé à titre personnel et obtenu dans le cadre d’un face à face avec des experts issus du milieu académique, qui évoque sans apparente « censure » le lien entre l’intégration des immigrés et la construction nationale ; d’autre part, un discours institutionnel qui ne s’exprime pas ouvertement sur ce lien, révélateur d’une classe politique qui semble réticente à briser une sorte de « tabou ». Comment dès lors penser « l’intégration nationale » des immigrés au Pays Basque ? Dans le point suivant nous mettons en relief une difficulté à concevoir une intégration ayant une composante nationalitaire, à l’origine de l’apparent détachement de la classe politique envers l’immigration comme thème majeur de politique publique.

3.3. Enjeux actuels et réserves politiques autour du discours sur l’intégration nationale

Une fissure politique afférente au soutien ou à l’opposition envers le nationalisme basque au sein de la classe politique va empêcher la construction d’une culture publique commune, et corrélativement freiner l’élaboration d’une conception institutionnalisée de l’intégration des immigrés à la « nation basque ». Il faut aussi considérer la place de la langue autochtone au bout de trente ans de normalisation linguistique, processus de rétablissement dans l’espace public d’une langue basque ayant été bannie sous la période franquiste [102]. Nous évoquons en dernier lieu un certain désintérêt des immigrés à l’égard du sort du nationalisme basque, témoignant de leur difficulté à déchiffrer les clés de compréhension de ce type de clivage politique.

Bien que les pouvoirs publics expriment la nécessité d’avoir un modèle propre - les plans font référence à la mise sur pied d’une « Politique Basque d’Immigration », en majuscule - la priorité politique donnée au traitement nationaliste de l’intégration des immigrés est à peine « imaginée » au sens propre du terme. À la différence des politiques de gestion migratoire en Catalogne, les politiques basques n’apparaissent pas suffisamment investies par le Gouvernement.

Nous recueillons en entretien avec des collectifs de soutien d’immigrés – en l’occurrence avec un membre de Sos-Racisme au Pays Basque - le regret de constater que « l’immigration n’est pas un axe dans la politique d’Euskadi » (entretien le 10/01/06), à l’époque menée par la coalition tripartite constituée du Parti Nationaliste Basque (PNV), de l’Izquierda Unida-Ezker Batua (IU-EB) et de l’ Eusko Alkartasuna (EA) [103]. Contrairement à ce que nous avons vu à propos du Pacte National pour l’Immigration catalan, il n’existe pas d’accord politique général entre partis, même s’il est raisonnable de penser que la question migratoire redéfinit nécessairement la société et l’identité basque. Par contre, ce « désinvestissement » du modèle d’intégration sur la question identitaire n’a pas empêché les autorités basques de mener une offensive contre la loi espagnole sur les étrangers [104] ni de mettre en place une politique très conséquente au niveau de la prise en charge sociale des immigrés [105]. L’accès aux droits sociaux y est véritablement universel contrairement à d’autres Communautés autonomes - y compris pour les « sans-papiers » recensés dans une commune basque - ce qui tempère sans doute l’impression de vide que l’opposition au Gouvernement pourrait attribuer à l’action publique basque.

Trois raisons principales expliquent le relatif « profil bas » des pouvoirs publics basques dans la construction d’un discours de l’intégration nationale. Tout d’abord, une croissance de population étrangère plus modeste en comparaison avec d’autres régions du pays ne suppose pas une menace pour le système basque de protection sociale. D’autre part, les enjeux politiques au Pays Basque durant la période 2000-2009 auraient été ailleurs que dans la question migratoire, davantage cristallisés autour des controverses identitaires au sein de la société d’accueil elle-même. Ainsi, le débat autour du « Plan Ibarretxe » [106] à la rentrée 2003, projet de réforme du Statut d’autonomie finalement échu en 2005 au Congrès des Députés, restait focalisé dans la question nationaliste en revendiquant le droit d’autodétermination pour la société basque, mais passait sous silence la question des immigrés [107]. Nous considérons enfin la grande difficulté pour faire de la langue basque la langue véhiculaire et qui aurait pu être un facteur de rassemblement culturel, voire identitaire.

Critiquant l’attitude résignée des forces « nationalistes » au pouvoir jusqu’en mars 2009 (fin du mandat de la coalition PNV-IU-EA), le sociologue membre de l’Observatoire basque de l’immigration insiste sur la nécessité concrète de « s’approprier » des actions gouvernementales en matière d’immigration. Il souhaite une politique globale véritablement libérée de l’influence étatique. Ses propos évoquent, sur un ton normatif, des critères d’efficacité autant qu’identitaires, qui doivent se conjuguer au service d’une politique déployée dans un contexte de pluralité nationale :

« Je pense que le Gouvernement basque devrait avoir les compétences sur la question de l’immigration en général. Car le Pays Basque est une unité de plus petite taille que l’État, il est donc plus proche des problèmes, c’est une échelle plus adaptée en terme d’efficacité dans la gestion. Et par ailleurs, que l’on soit d’accord ou pas, on est face à une réalité culturelle différenciée. Il y a ici une identité, une langue propre qui n’existent pas au niveau étatique. Le cadre de gestion de l’immigration doit être conjugué avec des réalités pluriculturelles et plurinationales » (entretien le 13/02/07).

Concernant la question linguistique, l’article 6 du Statut d’autonomie de 1979 déclare que l’euskera est la langue propre du Peuple basque, de sorte qu’elle est co-officielle avec le castillan : les citoyens ont le droit de connaître et d’utiliser les deux langues.

D’après des données de 2006, le basque est utilisé par 18,6% de la population dans leur activité quotidienne, la moyenne des personnes qui utilisent plus le castillan que le basque est de 11%, et 70% des personnes emploient exclusivement le castillan dans son utilisation au quotidien [108]. Pourtant, l’effort des institutions basques à l’égard de la normalisation linguistique se traduit dans des dépenses proportionnellement plus élevées qu’en Catalogne : en 2009 par exemple, 125,8 millions d’euros sont consacrés à la promotion de la langue basque (1,2% du budget total).

Une autre différence avec la Catalogne tient lieu des caractéristiques du système scolaire où il existe trois modèles linguistiques dans l’enseignement obligatoire : de préférence castillane, basque ou bilingue. Depuis la mise en place de ce système dans les années quatre-vingt, sur le nombre d’inscriptions sous la période 1983/1984 à 2007/2008, le modèle de préférence basque connaît une très forte croissance (de 14,2% à 56%), le modèle bilingue augmente constamment (de 8,1% à 21%) et le modèle privilégiant le castillan chute de 77,7% à 20,9% [109]. Par conséquent, s’il n’y a pas d’immersion linguistique totale, l’euskaldunisation [110] est prônée de manière intense dans le système éducatif pour les enfants autochtones et immigrés.

Symptomatique du faible ancrage de la langue basque, certaines enquêtes menées parmi des immigrés adultes montrent clairement le décalage qui existe entre la motivation pour apprendre le basque et le taux très faible de ceux qui suivent réellement des cours : dans la province de Biscaye, 45% des personnes interrogées disent souhaiter apprendre la langue, mais en réalité moins de 1% l’étudie [111]. Les principales raisons avancées à l’origine de cette relative « indifférence » des immigrées sont la difficulté de la langue basque et l’impression que le castillan est plus parlé que le basque et donc secondaire derrière l’accès au logement, le travail et l’apprentissage du castillan si nécessaire. Si l’intérêt pour la langue basque est perçu comme « une forme d’intégration », on présume qu’il varie très fortement selon un environnement plus ou moins bascophone, ou encore si son apprentissage est valorisé ou pas dans l’obtention d’un emploi. Qui plus est, l’absence de stabilité dans la résidence inhibe la volonté d’apprentissage du basque car « beaucoup d’immigrés arrivent en Euskadi sans perspectives d’y rester longtemps » [112].

Par conséquent, nous pouvons dire que l’apprentissage du basque n’est pas une obligation mais reste une condition fortement conseillée pour l’intégration. En tous cas, la politique linguistique adressée aux étrangers au Pays Basque ne serait pas cruciale pour leur enracinement social contrairement aux exigences des autorités administratives du côté catalan.
L’acculturation linguistique est un élément visible et moteur des politiques d’intégration des immigrés, mais en revanche plus dépendante d’aspects contextuels en fonction d’entourages linguistiques diversifiant les usages linguistiques. La politique linguistique au Pays Basque soulève autant de craintes que d’espoirs pour des institutions souhaitant revaloriser une langue effectivement « minoritaire ».

Mais le manque de stratégie du Gouvernement basque à moyen/long terme en matière d’intégration nationale est aussi la conséquence directe d’un contexte politique défavorable. Qui plus est, le manque de familiarité des immigrés au contexte politique basque est à l’origine, selon un député du Parti socialiste au Parlement basque, du détachement des immigrés aux problématiques spécifiques du nationalisme basque :

« Si nous-mêmes nous avons du mal à comprendre le ‘problème basque’, les gens qui viennent de l’extérieur doivent halluciner complètement. Ces gens-là viennent pour travailler, trouver un logement digne, ramener la famille, gagner leur vie. En tous cas il est certain que les immigrés seront plus sensibles au clivage gauche/droite qu’à celui de nationalisme/non nationalisme » (entretien, le 11/06/04).

En avril 2004, une polémique médiatique de forte ampleur illustre les tensions politiques au sein de la société basque autour de la question de l’immigration. La controverse a pour origine l’édition de calendriers contenant des photographies d’immigrés de plusieurs nationalités, habillés en tenues traditionnelles de mariage basque, et dont la légende disait : « Pour l’intégration, avec les portes ouvertes à tous ». Financés par le Gouvernement Basque, 18.000 calendriers et 8.000 affiches devaient être édités au titre d’une campagne de sensibilisation sur la réalité migratoire existante dans l’agglomération de communes de Lea-Artibai, dans la province de Biscaye.
Plusieurs voix accusèrent le Gouvernement basque de jouer la carte folklorique et l’assimilation [113]. Le promoteur de l’idée du calendrier prit aussitôt sa défense en expliquant la pertinence d’une campagne pensée pour un contexte local précis, où l’usage de la langue basque est fortement ancré :

«  Le calendrier ne cherche pas à incarner le modèle d’intégration que l’on soutient, seulement à mettre l’accent sur une réalité. Tout le monde sait que les gens ne sont pas habillés comme cela. Il faut retenir de cette affaire qu’il existe un pouvoir médiatique énorme, une certaine manipulation politique d’une idée toute simple et un effet boule-de-neige » (le 10/06/04).

Le calendrier fut interprété comme une tentative grossière d’intégrer les immigrés dans un contexte national unifié, alors que l’issue du projet souverainiste d’Ibarretxe mettait en lumière les écarts politiques entre les principales forces basques [114]. De ce fait, les partis non nationalistes, essentiellement le Parti Socialiste d’Euskadi (PSE) et le Parti Populaire, ont abandonné tout projet qui amalgamerait intégration sociale et nationale, qualifiant les discours du Gouvernement basque de démagogiques et irresponsables.

Au fil des remarques sur l’affaire du calendrier, un conseiller au Département des affaires sociales pointait une sorte de morcellement identitaire brouillant les contours de la « basquité » :

« Il est vrai que le calendrier adhère à une approche réductionniste ainsi qu’à une vision nationaliste et unidimensionnelle du pays, alors qu’on peut être Basque de multiples manières. La question ‘à quoi on va intégrer’ n’est pas consensuelle entre les autochtones, ce qui est typique d’une société clivée par le nationalisme. Celui-ci a, par nature, une prétention assimilationniste qui redoute l’immigration comme pouvant contribuer à sa dissolution identitaire  » (le 30/04/04).

La difficulté particulière que rencontrent les autorités basques à concilier gestion progressiste de l’immigration et dimension nationalitaire est d’ailleurs fréquemment soulignée par les forces de l’opposition à l’ancien gouvernement PNV-IU-EA. Un député appartenant au groupe socialiste basque pronostiquait que « l’immigration est toujours un défi pour le nationalisme  » [115]. La « culture publique commune » ne fait pas l’objet au Pays Basque d’une définition admise, ni par la classe politique ni par la société elle-même.

Ce contexte politique et social explique l’absence d’invocation d’un « précédent migratoire » et plus généralement l’inexistence d’une « doctrine basque de l’intégration » comme référentiel ou héritage cognitif capable d’inspirer les défis présents et futurs de l’intégration des étrangers. Il n’existe pas non plus d’élément politique ou culturel fédérateur au Pays Basque comme l’est la langue en Catalogne [116]. Le hiatus entre intégration sociale et nationale explique que l’exécutif basque n’a pas encore pu produire de politique globale consensuelle sous la période d’hégémonie du PNV. Depuis l’avènement de la démocratie en Espagne à la fin des années soixante-dix et frappée par l’existence du terrorisme de l’ETA, la société basque est plus polarisée que la société catalane [117]. Ni la faible présence de l’immigration, ni l’anticipation dans la mise en place de ces politiques, n’ont pu permettre l’émergence d’un discours institutionnel unifié proposant une vision consensuelle de la « nation basque ».

Deux modèles d’intégration aux profils distincts : des enjeux similaires mais des contextes différents

À titre de conclusion nous pouvons dire que la comparaison entre la Catalogne et le Pays Basque met en évidence des résultats inégaux dans l’appropriation des politiques d’intégration des immigrés à l’égard de l’État : en Catalogne, via une approche assimilationniste et d’acculturation linguistique ; au Pays Basque, via une approche plus politique et contestataire. Nous pouvons dire que la variable nationalitaire joue un rôle fondamental dans la mise sur pied des politiques d’intégration des immigrés uniquement en Catalogne.

Les raisons invoquées pour expliquer le succès relatif de l’appropriation d’un modèle catalan se jouent autant sur la dimension de la gestion que sur les aspects plus identitaires : elles relèvent d’une part d’une entreprise réussie de modification du cadre juridique et des rapports de pouvoirs à l’État, à travers la réforme du Statut catalan en 2006, autorisant les institutions catalanes à jouir d’une autonomie incontestable. D’autre part, ces institutions régionales reprennent un héritage discursif de réactualisation de la « doctrine catalane de l’intégration » qui érigeait la Catalogne en « terre d’accueil » dans l’immigration interne des années 1960. Une raison supplémentaire du succès de l’élaboration d’un modèle catalan relève de la volonté d’instituer la langue propre comme vecteur d’intégration. L’usage très répandu du catalan favorise par conséquent l’incorporation des immigrés dans les rails de la « normalisation linguistique ».

En revanche, avec une assez faible démographie étrangère au Pays Basque, les institutions ne sont pas parvenues à modifier le Statut d’autonomie de Guernica de 1979 dans un contexte politique de fortes dissensions. Ceci induit un certain blocage dans les possibilités « d’autonomiser » davantage leur politique publique. S’agissant de la restitution de ce passé d’immigration « castillane » dans un discours politique, il n’a pas fait l’objet d’accords entre les forces politiques, bien au contraire. Un élément supplémentaire qui explique le dénouement d’une définition moins élaborée du modèle d’intégration, est lié à l’usage de la langue propre, nettement moins répandue que la langue catalane malgré des avancées dans cette politique linguistique.

De manière plus générale il convient de se demander si, au final, le partage des instruments conduisant à l’intégration nationale pose le même type de défis aux « nations sans État » qu’aux États-nations. Quel que soit le cadre de l’intégration, étatique ou infra-étatique, tant qu’une société se donne pour priorité la préservation de ses propres signes identitaires dans la gestion de la diversité culturelle, nous pouvons augurer un mimétisme entre une logique stato-nationale et une logique infra-nationale. Seule une comparaison étendue à d’autres cas de nations minoritaires nous permettrait de confirmer ou infirmer la tendance assimilationniste des modèles d’intégration ou au contraire, leur capacité à innover face aux États.

NOTES

[1] Ritaine Evelyne, 2003, « Dos à la mer ? Les pays européens du Sud face à l’immigration », in Critique internationale n° 18, janvier, p. 152.

[2] Maldonado Juan, 1995, “ España, una nación de naciones ”, Política y Sociedad, n°20, pp. 23-33.

[3] Requejo Ferrán (coord.), 2002, Democracia y pluralismo nacional, Barcelona, Ariel, et Requejo Ferrán, 2007 Federalismo plurinacional y pluralismo de valores : el caso español, Madrid, Centro de Estudios Políticos y Constitucionales.

[4] Ce traitement différentiel, selon lequel la Catalogne, le Pays Basque et la Galice sont des « nations historiques » se justifie par le fait d’avoir joui dans le passé, notamment lors de la IIème République proclamée en 1931, de statuts d’autonomie très élargis.

[5] Sur la notion de nationalismes « périphériques » organisés en élites politiques, voir par exemple Genieys William, 1997, Les élites face à l’Etat. Changements de régimes politiques et dynamiques centre-périphéries, Paris, L’Harmattan. Voir aussi dans une perspective historique, Campuzano Francisco (coord.), 2001, Les nationalismes en Espagne. De l’Etat libéral à l’Etat des autonomies, 1876-1978, Montpellier, Université Paul Valéry-Montpellier III.

[6] Pour ce qui est du Pays Basque, le gouvernement change de couleur politique en mars 2009 par la substitution d’une majorité nationaliste autour du Parti nationaliste basque (PNV) à la présidence du socialiste Patxi López.

[7] Guibernau M., Nacions sense Estat. Nacionalisme i diversitat en l’era global, Barcelona, Columna Assaig, 1999.

[8] Keating Michael, 1996, Nations against the State : the new politics of nationalism in Quebec, Catalonia and Scotland, Londres, Macmillan Press Ltd.

[9] Suite à l’adoption de la Constitution de 1978, les 17 Communautés autonomes se sont dotés de statuts d’autonomie, lois organiques régissant les institutions et les pouvoirs des ces régions.

[10] Créé en 2001, ce conseil réunit l’État, les Communautés autonomes et les collectivités locales, en plus des syndicats et du patronat : il est pensé pour être le lieu de concertation et de participation des gouvernements infra-étatiques dans la détermination des besoins spécifiques de main d’œuvre selon chacune des régions. De nombreuses critiques se laissent entendre concernant leur trop faible capacité de décision.

[11] Roig Eduard, 2006, “Relaciones intergubernamentales en materia de inmigración : desarrollo de un modelo en construcción”, in Aja E., Montilla J. A., Roig E., Las Comunidades Autónomas y la inmigración, Valencia, Tirant lo Blanch, pp. 148-149. Voir aussi Montilla José Antonio, 2006, « Inmigración y Comunidades Autónomas » in Aja E., Arango J., Veinte años de inmigración en España : Perspectiva jurídica y sociológica (1985-2004), Barcelona, Cidob, pp., 339-367.

[12] Cet engagement de l’État est formalisé dans la prévision des « fonds de soutien à l’accueil et à l’intégration des immigrés ainsi qu’au renfort éducatif » avec un budget annuel qui a augmenté de 120 millions d’euros en 2005 jusqu’à 200 millions en 2009.

[13] Article 138 de la loi organique 6/2006 du 19 juillet de réforme du Statut d’autonomie de la Catalogne.

[14] La loi espagnole a fait l’objet de multiples réformes depuis sa première formulation en 1985 jusqu’à sa dernière en 2009, décrivant ainsi une évolution politique assez tumultueuse au gré des alternances politiques des gouvernements successifs. Pour une vue d’ensemble, Aja E., Arango J., 2006, Veinte años de inmigración en España : Perspectiva jurídica y sociológica (1985-2004), Barcelona, Cidob.

[15] Au 1er janvier 2011, la population totale recensée en Espagne est de 47.150.819 personnes, en Catalogne de 7.535.251 et au Pays Basque de 2.183.615.

[16] Voir par exemple Zapata-Barrero R., Van Dijk T. (eds.), 2007, Discursos sobre la inmigración en España. Los medios de comunicación, los parlamentos y las administraciones, Cidob, Barcelona.

[17] L’exploitation du terrain dans cette recherche issue d’un travail de thèse doctorale a consisté dans la réalisation d’un matériau qualitatif de soixante douze entretiens semi-directifs avec des acteurs issus des gouvernements et administrations, des membres de partis politiques, des représentants de la société civile et des experts dans le domaine de l’immigration en Espagne et dans les deux Communautés Autonomes étudiées.

[18] Devenus des outils indispensables à la mise en œuvre des politiques d’intégration, ces plans adoptés dans l’ensemble des administrations dans chaque niveau – État, Communautés autonomes et municipalités - contiennent le diagnostic, les principes et les mesures de politiques publiques en la matière.

[19] Pour un bilan de la littérature espagnole assez exhaustif sur la question migratoire dans les sciences sociales jusqu’en 2006, voir Bardají Ruiz Federico, 2006, Literatura sobre inmigrantes en España, Madrid, Documentos del Observatorio Permanente de la Inmigración.

[20] Par exemple Solé Carlota, Izquierdo Antonio, 2005, Integraciones diferenciadas : migraciones en Cataluña, Galicia y Andalucía, Madrid, Anthropos ; Zapata-Barrero Ricard, 2004, Inmigración, innovación política y cultura de acomodación en España. Un análisis comparativo entre Andalucía, Cataluña, la Comunidad de Madrid y el Gobierno Central, Barcelona, Fundació Cidob.

[21] Gil Araújo Sandra, 2007, Thèse Doctorale “Las argucias de la integración. Construcción nacional y gobierno de lo social a través de las políticas de integración de inmigrantes. Los casos de Cataluña y Madrid”, Universidad Complutense de Madrid ; on peut citer aussi Davis Andrew, “Multi-nation building ? Immigrant integration policies in the autonomous communities of Catalonia and Madrid”, in Zapata-Barrero R. (ed.), Citizenship policies in the age of diversity. Europe at the crossroads, Barcelona, Cidob, 2009.

[22] Gil Araújo Sandra, 2007, “Discursos políticos sobre la nación en las políticas catalanas de integración de inmigrantes”, in Zapata-Barrero R., Van Dijk T., (eds.) Discursos sobre la inmigración en España. Los medios de comunicación, los parlamentos y las administraciones, Barcelona, Fundación Cidob, pp. 223-268.

[23] Favell Adrian, 2001 (1998), Philosophies of Integration. Immigration and the Idea of Citizenship in France and Britain, New York, Palgrave.

[24] Zapata-Barrero Ricard, 2008, La inmigración en naciones minoritarias. Flandes, Quebec y Cataluña en perspectiva, Barcelona, Icaria, p. 129.

[25] J’ai développé cette question dans de ma thèse doctorale : « Des stratégies d’appropriation des modèles d’intégration par les Communautés autonomes en Espagne. Une étude comparative des politiques d’intégration des étrangers en Catalogne et au Pays Basque (2000-2009) ».

[26] Voir par exemple Parekh Bhikhu, 2000, Rethinking Multiculturalism : Cultural Diversity and Political Theory, Cambridge, Mass, Harvard University Press.

[27] Voir par exemple, Withol de Wenden Catherine, 1988, Les immigrés et la politique. Cent cinquante ans d’évolution, Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques ; Costa-Lascoux Jacqueline, Weil Patrick, 1992, Logiques d’État et immigrations, Paris, Kimé.

[28] Zapata-Barrero Ricard, 2010, « La politique d’immigration en Catalogne dans le contexte espagnol », intervention au colloque « Regards croisés sur l’immigration en Catalogne et en France », Paris, CERI-SciencesPo, le 29 avril.

[29] Gagnon Alain-G., 2007, “Immigració en un context multinacional : del laissez faire al marc institucional del Quebec”, in Zapata-Barrero R. (coord.), Immigració i autogovern, Proa, Barcelona, pp. 25-49.

[30] Guibernau Montserrat, 1999, Nacions sense Estat. Nacionalisme i diversitat en l’era global, Barcelona, Columna Assaig.

[31] Pour illustrer cette sorte de désinhibition dans l’affichage de politiques publiques en général produites sous le sceau du nationalisme, on reprend l’interrogation très expressive « pourquoi se priver d’être nationaliste ? ». Voir Cultiaux Yolaine, 2007, « Le nouveau statut d’autonomie de la Catalogne : Acte II de l’État des Autonomies », Critique internationale, n° 37. 4, pp. 23-35.

[32] Gil Araújo Sandra, 2009, “La gestión de la cuestión nacional : España y Cataluña en perspectiva”, in Zapata-Barrero R. (coord.), Políticas y gobernabilidad de la inmigración en España, Barcelona, Ariel, pp. 232-233 ; “Discursos políticos sobre la nación en las políticas catalanas de integración de inmigrantes”, in Zapata-Barrero R., Van Dijk T., (eds.) Discursos sobre la inmigración en España. Los medios de comunicación, los parlamentos y las administraciones, Barcelona, Fundación Cidob, pp. 223-268.

[33] Entretien avec l’ancien Secrétaire pour l’immigration, Á. Miret, le 14/03/06.

[34] Zapata-Barrero Ricard, 2005, “Construyendo una filosofía pública de la inmigración en Catalunya : los términos del debate”, Revista de derecho migratorio y extranjería, n° 10, novembre, pp. 9-38.

[35] R. Zapata-Barrero développe ainsi sa thèse : « Dans cette relation de pouvoir, la position de l’immigré acquiert un caractère vital. Une politique d’immigration mal envisagée peut accroître la dualité Espagnol/Catalan », ibid., p. 32.

[36] Colomer Josep M., 1986, Cataluña como cuestión de estado. La idea de nación en el pensamiento político catalán (1939-1979), Madrid, Tecnos, p. 9.

[37] Nous énumérons les plans d’intégration ayant été adoptés par le Gouvernement catalan avant le Pacte National pour l’Immigration signé en décembre 2008 : 1er plan interdépartemental d’immigration (1993-2000), 2ème plan (2001-2004) et le 3ème plan intitulé de « de citoyenneté et d’immigration » (2005-2008).

[38] Pla de Ciutadanía i Immigració 2005-2008, 2006, Barcelona, Generalitat de Catalunya, mai, p. 29.

[39] Pacte Nacional per a la Immigració. Un pacte per viure junts i juntes, 2008, Barcelone, Generalitat de Catalunya, signé le 19 décembre.

[40] « La Catalogne s’est construite au fil du temps avec les apports d’énergies de plusieurs générations et de nombreuses traditions et cultures qui y ont trouvé une terre d’accueil ».

[41] Pla Interdepartamental d’Immigració 2001-2004, 2001, Barcelona, Generalitat de Catalunya, octubre, p. 11.

[42] Miret Naïk, 1997, « L’évolution du panorama migratoire en Catalogne du Sud, 1950-1975 », Revue Européenne des Migrations internationales, Vol. 13. 3, p. 47.

[43] Pla Interdepartamental d’Immigració 2001-2004, op. cit., p. 11.

[44] Pujol Jordi, 1976, La immigració, problema i esperança de Catalunya, Barcelona, Nova Terra.

[45] Barbosa Célia, 1999, « Le ‘creuset’ catalan ? Construction nationalitaire et capacité d’intégration », Pôle Sud, n° 11, novembre, pp. 24-37.

[46] Garcia Marie-Carmen., 1997, « La politique nationaliste et l’identification territoriale des immigrants de l’intérieur », Revue Européenne de Migrations Internationales, vol. 13. 3, pp. 85-98.

[47] « La Catalogne a et aura une doctrine sur l’immigration relative à la population provenant du reste de l’Espagne entre les années vingt et soixante du XXe siècle (…). Le précédent migratoire de ces années passées doit nous être utile en ce qui concerne la nouvelle population qui arrive, pour savoir l’accueillir et cultiver la diversité culturelle avec ses avantages et défis corrélés. Nous ne pouvons pas oublier que le bilan positif de l’antérieur cycle migratoire va être favorisé par un respect mutuel et une entente au sein de la grande majorité de la population, en marge de sa culture d’origine », Pla Interdepartamental d’Immigració 2001-2004, op.cit., p. 117.

[48] Barbosa Célia, 1999, « Le ‘creuset’ catalan ? Construction nationalitaire et capacité d’intégration », Pôle Sud, n° 11, novembre, p. 31.

[49] Pujol J., 1976, La immigració, problema i esperança de Catalunya, Barcelona, Nova Terra.

[50] Nous citons ces partis : le courant de droite, chrétien et nationaliste (Unió Democràtica de Catalunya), les mouvements ouvriers et communistes (Partit Obrer d’Unificació Marxista et Partit Socialista Unificat de Catalunya), indépendantistes et socialistes (Moviment Socialista de Catalunya). Le texte de l’Assemblée de Catalogne peut être consulté dans "Comissió permanent de l’Assamblea de Catalunya (Portaveu de la comissió permanent), n°1, Gener 1972", Base documental d’Història Contemporània de Catalunya. El Franquisme (1939-1975). Desenvolupament esbogerrat (1959-1975) : http://www.xtec.es/ jrovira6/franco..., consulté le 16/03/2012.

[51] Candel Francisco, 1964, Els altres catalans, Barcelona, Edicions 62.

[52] Voir dans ce sens Cabrera Lluís, Fernández Miguel, Morón Pedro, Moya Bienve, Portal Juan Miguel, Riera Marta, 2005, Els altres andalusos. La qüestió nacional de Catalunya, Barcelona, L’esfera dels llibres.

[53] Garcia Marie-Carmen, 1998, L’identité catalane : Analyse du processus de production de l’identité nationale en Catalogne, Paris, L’Harmattan.

[54] Par exemple, dans son prologue on peut lire une phrase de F. Candel qui synthétise cette doctrine : « Avec les immigrés d’aujourd’hui aura lieu le même processus qu’avec ceux d’hier et ceux de toujours. Ils seront Catalans. Qui en doute ? », Pacte Nacional per a la Immigració, op. cit.

[55] Les dernières élections en Catalogne ont eu lieu le 28 novembre 2010 avec la reprise du pouvoir de la CiU. Entre 2003 et 2010 le gouvernement a été mené par une coalition entre le PSC (à tendance régionaliste mais non nationaliste), et des partis indépendantistes et de gauche, ERC et ICV.

[56] Cultiaux Yolaine, 2007, « Le nouveau statut d’autonomie de la Catalogne : Acte II de l’État des Autonomies », Critique internationale, n° 37. 4, p. 30.

[57] Conformément à l’opinion du Tribunal Constitutionnel qui n’allait s’exprimer qu’en juin 2010, la reconnaissance de la « nation » est finalement consignée en préambule et non dans le corps des articles, ce qui a déçu considérablement ceux qui désiraient davantage de reconnaissance « nationale ».

[58] II Pla Interdepartamental d’Immigració 2001-2004, 2001, Barcelona, Generalitat de Catalunya, octobre.

[59] Il est Président de la Generalitat depuis décembre 2010.

[60] Nous le traduisons par « Nous sommes tous la Catalogne ».

[61] « Il existe une obligation pour la communauté d’accueil de communiquer aux immigrés souhaitant s’installer dans son territoire des expectatives légitimes comme ‘société distincte’ par rapport à la majorité dominante », Zapata-Barrero Ricard, 2008, La inmigración en naciones minoritarias. Flandes, Quebec y Cataluña en perspectiva, Barcelona, Icaria, p. 22.

[62] “Mas abre de par en par la ‘casa gran’ catalanista a los inmigrantes”, El Periódico de Cataluña, 4/12/08.

[63] Il poursuit son discours ainsi : « Se sentir catalan relève aussi de votre volonté, d’une conquête. Je vous demande que vous aimiez ce pays comme vous aimez le vôtre », voir “Artur Mas, o el Candel de los paquistaníes”, El Mundo, 4/12/08.

[64] La loi de normalisation linguistique de 1983 vise à l’époque les « migrants de l’intérieur », cf. Garcia Marie-Carmen, 1998, L’identité catalane : Analyse du processus de production de l’identité nationale en Catalogne, Paris, L’Harmattan.

[65] Ces régions sont : l’Alguer (en Sardaigne), l’Andorre, la Communauté Autonome catalane, la Catalogne nord, la Communauté Autonome valencienne, la Franja (partie orientale d’Aragon) et les Iles Baléares.

[66] Voir le site de la Generalitat consacré à la langue catalane : “El catalán ocupa el puesto 88 en el ranking de las lenguas más habladas en el mundo” : http://www20.gencat.cat/portal/site....

[67] Boyer Henri, 2004, « Langue et nation : le modèle catalan de nationalisme linguistique », Mots. Les Langages du politique, n° 74, mars, p. 34.

[68] « Une politique d’immigration dans un cadre national sans outils étatiques est essentiellement articulée comme politique linguistique », Zapata-Barrero Ricard, 2008, La inmigración en naciones minoritarias. Flandes, Quebec y Cataluña en perspectiva, Barcelona, Icaria, p. 144.

[69] Nous traduisons par « Réseau d’information et sélection professionnelle dans les pays d’origine » (Xarxa d’Informació i Selecció Laboral en Origen -XILA). Des bureaux de sélection furent ouverts au Maroc, en Pologne et en Colombie.

[70] “Inmigración veta las oficinas de empleo catalanas en el extranjero”, Cinco días, 27/05/02 ; “Las polémicas oficinas de la Generalitat en el extranjero”, El Mundo, 15/01/03.

[71] Mesure qui représente un tiers du budget destiné à la promotion du catalan.

[72] Fédération des associations américaines en Catalogne : http://www.fasamcat.org/es/home/, consulté le 16/03/2012.

[73] “La comunidad latina duda del Pacto de Inmigración por excluir el español”, El Mundo, 12/02/09.

[74] Elle comprend plus de quatre-vingt organisations (http://www.fedelatina.org/, consulté le 16/03/2012).

[75] Ceci sera formalisé dans l’accord sur la promotion de l’usage du catalan signé le 24 septembre 2009 entre la “Plataforma per la Llengua” (ONG engagée dans la diffusion de la langue catalane) et la dite fédération. Voir l’article “Conveni entre la Plataforma per la Llengua i Fedelatina per promoure el català”, sur le site http://www.plataforma-llengua.cat/n..., 30/09/09 (consulté le 16/03/2012). Voir aussi concernant l’accord de collaboration entre la Plateforme pour la langue et Fedelatina, le bulletin n° 40 du Secrétariat de l’Immigration, le 8/10/09.

[76] Entre 2004 et 2010, sur le total des personnes étrangères inscrites aux cours d’initiation au catalan, 46% sont d’origine sud-américaine (Balanç de Política Lingüística 2004-2010, Balanç de Política Lingüística 2004-2010, 2010, Secretaria de Política Lingüística, Departament de la Vicepresidència, Generalitat de Catalunya, juillet, p. 44.

[77] “Acte d’adhesió de la immigració llatinoamericana al Pacte Nacional per a la Immigració”, bulletin du Secrétariat pour l’immigration, n° 25 (12/02/09).

[78] Ritaine Evelyne, 2003, « Dos à la mer ? Les pays européens du Sud face à l’immigration », in Critique internationale n° 18, janvier, p. 154.

[79] Fondé en 2002 par Josep Anglada qui a été désigné comme le « Haider catalan » et le « Le Pen catalan », ce parti de portée pour l’heure locale a pour objectifs « un meilleur contrôle de l’immigration et plus de sécurité citoyenne ». Il se fait connaître à partir d’une polémique autour de la gestion de l’espace public local par le refus de la construction d’une mosquée à Premià de Mar (cf. http://www.pxcatalunya.com/web/hist...).

[80] Casals Xavier, 2009, "La Plataforma per Catalunya : la eclosión de un nacional-populismo catalán (2003-2009)", Working Papers n°274, Barcelona, Institut de Ciències Polítiques i Socials, p. 3.

[81] Pujol Jordi, 2001, “Ante el gran reto de la inmigración”, La Factoría, n° 13 Octobre-novembre.

[82] “Las ayudas son para una gente que no sabe ni lo que es Catalunya”, El Periódico, 21/02/01 ; “Cubos de gasolina sobre las llamas”, El País, 22/02/01.

[83] “Cuando Haider dice que en Austria hay demasiados extranjeros no es racista”, La Vanguardia, 27/02/2001.

[84] “Protestas por el apoyo de Pujol a la posición de su esposa sobre la inmigración”, El País, 25/02/01 ; “La oposición expresa su repulsa a las opiniones de la esposa de Pujol sobre los inmigrantes”, El País, 22/02/01.

[85] Voir aussi l’article d’A. Santamaría, “Inmigración, nacionalismo y racismo. El caso catalán”, Solidaridad.net, 19/05/03 ; et l’article signé par J. Ramoneda “El nacionalismo es xenófobo”, El País, 6/03/01.

[86] À titre d’exemple le leader J. M. Pelegrí affirmait au Congrès des députés en février 2006 que « des personnes qui ne connaissent pas notre langue ne peuvent pas voter » (“Los partidos catalanes, divididos ante el derecho de voto de los inmigrantes,” El País, 19/08/06).

[87] Ces deux partis se rejoignent idéologiquement dans leur opposition essentielle au nationalisme catalan, quoi que pour des raisons et des partis pris politiques très différents.

[88] Kymlicka Will, 2001, “Immigrant Integration and Minority Nationalism”, in Keating M., McGarry J., Minority Nationalism and the Changing International Order, Oxford, Oxford University Press, pp. 61-83.

[89] Un numéro de la revue éditée par Sos Racismo Mugak consacre en 2000 un numéro entier à la manière dont les médias reflètent le thème de l’immigration : Revista Mugak n°2 : “Racismo y medios de comunicación”, 1/05/00 : http://revista.mugak.eu/articulos/l....

[90] “Inmigración extranjera y opinión pública : ¿Estados de opinión o estados de ánimo ?”, 2006, Ikuspegi-Panorámicas de la inmigración n°13, décembre, p. 4.

[91] Entretien avec un responsable de la CEAR (Comisión Española de Ayuda al Refugiado, créée en 1979 et ayant une forte implantation nationale) et conseiller au Département des affaires sociales du Pays Basque, le 13/01/06.

[92] Ce type d’organisme a été créé dans la plupart des Communautés autonomes au tournant des années 2000 en tant que centres d’études sur le phénomène migratoire rattachés aux gouvernements autonomiques.

[93] Ces flux migratoires furent toutefois accompagnés par une importante émigration de ressortissants basques vers les « Amériques » - désignés comme la « diaspora basque » - ou vers d’autres pays européens pour fuir le franquisme.

[94] Ruiz Olabuénaga José Ignacio, Blanco Cristina, 1994, La inmigración vasca : análisis trigeneracional de 150 años de inmigración, Universidad de Deusto.

[95] Pour ne citer que quelques ouvrages fondamentaux dans l’historiographie du nationalisme basque : Corcuera Javier, 1979, Orígenes, ideología y organización del nacionalismo vasco (1876-1904), Siglo XXI, Madrid ; Elorza Antonio, 1979, Ideologías del nacionalismo vasco 1876-1937 : (de los "euskaros" a Jagi Jagi), Donostia, Haranburu, 1978 ; Solozábal J. J., El primer nacionalismo vasco. Industrialismo y conciencia nacional, San Sebastián, Haranburu.

[96] « L’industrialisation et l’immigration soulève en Euskal Herria un affrontement entre deux communautés ethniquement différentes (l’autochtone et l’immigrée) », Corcuera Javier, op. cit., p. 384.

[97] Aierdi Xavier, 1993, “La inmigración en el espacio social vasco. Tentativa de descodificación de un mundo social”, Thèse de doctorat en sociologie, Leioa, Université du Pays Basque.

[98] Blanco Cristina, 1994, “Inmigración e identidad colectiva. Reflexión sobre la identidad en el País Vasco”, Papers, n° 43, p. 48.

[99] Le Gouvernement basque a adopté jusqu’à présent trois plans successifs en matière d’immigration : le premier s’étale de 2003 à 2005, le deuxième de 2007 à 2009 et le troisième de 2011 à 2013.

[100] « Euskal Herria » est l’appellation propre historique et nationale du Pays Basque. Littéralement « herri » veut dire « territoire », « pays » ou « patrie » basque. Son emploi suggère la revendication territoriale étendue à sept provinces : le Pays Basque espagnol et la Navarre (désigné « Hegoalde »), et trois provinces françaises faisant partie du département des Pyrénées Atlantiques (« Iparralde » : la Basse-Navarre, la Soule et le Labourd).

[101] Les deux extraits sont tirés de Aierdi Xabier, 2000, “La inmigración española a Euskal Herria”, Gaiak-Euskonews & Media, n° 101.

[102] Adoptée suite aux élections de 1980 remportées par le PNV de C. Garaikoetxea, l’objectif de la loi « de normalisation de l’usage de l’euskera » de 1982 est d’inverser la dynamique de recul de la langue basque dans le nouveau régime démocratique.

[103] Le Parti Nationaliste Basque est le parti nationaliste de droite ayant gouverné seul ou en coalition de 1980 jusqu’en mai 2009 ; IU-EB est une coalition de gauche et écologiste ; EA est un parti créé lors de la scission avec le PNV, de tendance plus social-démocrate que celui-ci.

[104] En effet, le Parlement basque est précurseur dans l’interposition de plusieurs recours d’inconstitutionnalité contre la loi espagnole contre les étrangers devant le Tribunal Constitutionnel, notamment contre la réforme 8/2000 approuvée par le Partido Popular (PP).

[105] Ce système de protection sociale universel et très progressiste est rendu possible par le pacte de financement avec l’État connu comme le « concierto économico ».

[106] Juan José Ibarretxe, Président du Gouvernement basque de 1999 à 2009, fut le promoteur de ce plan dit « souverainiste ».

[107] Propuesta de Estatuto Político de la Comunidad de Euskadi, 2003, Ajuria-Enea, Gobierno Vasco, 25 novembre.

[108] IV Encuesta Sociolinguïstica 2006, 2006, Vitoria-Gasteiz, Administración de la Comunidad Autónoma del País Vasco – Departamento de Cultura, Servicio Central de Publicaciones del Gobierno Vasco, juin.

[109] IV Mapa Sociolinguïstico 2006, 2009, Vitoria-Gasteiz, Administración de la Comunidad Autónoma del País Vasco – Departamento de Cultura, Servicio Central de Publicaciones del Gobierno Vasco, avril.

[110] Le terme vient de « euskaldún » désignant toute personne parlant le basque.

[111] Par exemple, CEAR-Euskadi, 2008, “Estudio sobre el interés y uso del euskera por parte de la población inmigrante y refugiada”.

[112] “El 45% de los inmigrantes de Vizcaya quiere aprender euskera, pero menos del 1% lo estudia”, El País, 24/12/08.

[113] « La photo des petits noirs aux bérets est de la pure assimilation » dira un membre du PSE (le 11/06/04).

[114] Il fut qualifié d’« antichambre de l’ethnicisme pur » par un député du PSE (le 11/06/04). Un député du PP affirmait que : « Le calendrier est le fruit d’une schizophrénie caractéristique de la société basque. Il serait invraisemblable de voir une campagne de communication de cette nature ailleurs en Espagne ; je n’imagine pas des immigrés habillés en toreros à Séville » (le 14/06/04).

[115] Entretien, le 11/06/04.

[116] Shafir Gershon, 1995, Immigrants and Nationalists : Ethnic Conflict and Accommodation in Catalonia, the Basque Country, Latvia, and Estonia, N.Y., State University of New York Press ; Conversi Daniel, 1997, The Basques, the Catalans and Spain. Alternatives Routes to Nationalist Mobilisation, UK, C. Hurst & Co., 1997.

[117] Moreno del Río Carmelo, 2000, “Democracia, Constitución y Nacionalismo en Euskadi : tres discursos circulares para negar la existencia de una comunidad política”, Revista Española de Ciencia Política, n° 3, octobre, pp. 125-148.